Jean-Charles Réno
Le détachement est-ce important ? De nombreux problèmes dans la vie peuvent découler de l’attachement. La colère, l’inquiétude, la gourmandise, les plaintes infondées et divers complexes peuvent tous être des résultats de cet attachement. Ces sources de malheur, de tension, d’entêtement et de tristesse ont pour origine notre incapacité à lâcher prise. Si vous faites face à un problème ou à une inquiétude, examinez-vous attentivement. Et vous découvrirez probablement que l’attachement en est la cause.
Pourquoi le détachement est si important ?
Une histoire zen célèbre sur le détachement illustre ce concept.
Un maître et son disciple se rendaient dans un village voisin lorsqu’ils atteignirent une rivière en furie. Sur la rive, ils virent une belle jeune fille tentant de la traverser.
Le maître Zen, contre les préceptes habituels. Offrit son aide en la soulevant dans ses bras pour la porter de l’autre côté. Après cet acte, chacun poursuivit son chemin. Cependant, le disciple était troublé, car le maître lui avait toujours enseigné qu’un moine ne devait jamais s’approcher d’une femme ni la toucher.
Après réflexion, à leur retour au temple, le disciple ne put plus se contenir et demanda des explications au maître.
— Maître, tu m’apprends jour après jour à ne jamais toucher une femme. Et malgré cela, tu as pris cette belle fille dans tes bras et tu as traversé la rivière avec elle.
— Imbécile – répondit le maître – j’ai laissé la fille sur l’autre rive de la rivière. Mais toi tu la portes toujours.
La leçon ici réside dans la nature du détachement.
Il ne s’agit pas d’indifférence ou de fuite face aux problèmes de la vie. Il ne nous est pas demandé de devenir insensibles ou d’éviter la réalité. Le détachement, plutôt que d’être un rejet, représente une liberté. Qui émerge lorsque l’on cesse de s’attacher aux sources de la souffrance.
Il ne s’agit pas de fuir la vie, car une vie sincère ne peut être évitée. C’est plutôt un état de paix intérieure, accompagné d’une compréhension claire du fonctionnement de notre esprit. Comme le dit Matthieu Ricard. Le détachement est une liberté qui découle de la cessation de l’attachement aux causes de la souffrance.
Affronter les réalités de la vie et résoudre ses problèmes est incontournable.
Mais il faut essayer de ne pas s’attacher à ces aspects. Bien que l’argent soit indéniablement important, celui qui s’y accroche devient esclave de la richesse et souvent avare. Il est facile de s’attacher à notre apparence, à nos compétences ou à nos biens, ce qui peut nous conduire à nous sentir supérieurs aux autres. De même, s’attacher à la laideur, au manque de compétences ou à la pauvreté peut nous faire ressentir une infériorité vis-à-vis des autres.
L’attachement à des conditions favorables peut mener à l’avidité et à un optimisme superficiel.
Tandis que l’attachement à des conditions défavorables peut engendrer du ressentiment et du pessimisme. En fin de compte, notre attachement aux choses matérielles, aux circonstances, aux émotions et aux idées est souvent plus problématique que nous ne le pensons.
Il est essentiel de cultiver un équilibre, de faire preuve de détachement et de développer une compréhension profonde de la nature éphémère et changeante de la vie.
Lorsque le malheur frappe, il est courant de s’y attacher.
Mais il serait préférable de ne pas succomber à cette tentation. La plupart des malheurs peuvent être guéris, à l’exception de la mort. Lorsque la fatigue se fait sentir, il est sage de l’accepter et de faire de son mieux pour se rétablir, en la transcendant si possible.
La vie est en constante évolution, tout est changeant, toutes les conditions sont sujettes à modification. Il faut essayer de « lâcher prise ». Que ce soient les abus, la colère ou la censure, laissez-les venir et laissez-les partir.
Chaque action que nous entreprenons doit être réalisée avec sincérité, honnêteté et engagement total.
Cependant, une fois accomplie, il ne faut pas s’y attacher. Beaucoup de gens s’accrochent au passé ou se projettent dans le futur, négligeant ainsi le présent, qui est pourtant essentiel. Il est impératif de vivre pleinement le « maintenant » avec responsabilité. Profitez du soleil lorsqu’il brille et apprenez à apprécier la pluie lorsqu’elle tombe. Laissez toutes choses dans la vie venir et partir. C’est un secret de la vie qui nous permet d’éviter l’ennui et la névrose.
Bouddha a enseigné que la nature même de la vie et du monde est caractérisée par un changement constant.
Par conséquent, il recommandait de ne pas s’y attacher.
Dans le livre « Bouddhisme essentiel », il est souligné que le détachement ne signifie pas se désintéresser ou s’éloigner des choses. Mais plutôt s’engager avec elles avec une profonde compréhension de leur nature changeante.
Beaucoup de personnes peuvent mal interpréter l’idée de détachement en pensant qu’il s’agit d’une forme de dissociation.
En réalité, le détachement représente une ouverture totale à tout, une véritable intimité et une implication profonde dans toutes les choses de la vie. En essence, le détachement consiste à abandonner ce qui a été initialement « attrapé » et maintenu comme s’il était permanent, ou selon nos idées préconçues sur la manière dont les choses devraient être.
Une citation du philosophe danois Søren Kierkegaard, extraite du documentaire « Inner Worlds Outer Worlds », souligne cette idée en déclarant que « Si vous me donnez un nom, vous me reniez. »
Cela suggère que même l’attribution d’un nom peut symboliser un attachement, une négation de la réalité telle qu’elle est, et une tentative de solidifier une idée ou un concept dans une forme intrinsèquement éphémère. Dans ce contexte, ne pas réussir à se fixer impliquerait de lâcher prise. Ainsi, le concept même du « soi » doit être examiné en tant qu’idée ou concept, puis libéré.
