
Clarice Lispector écrit comme si elle scrutait l’âme à mains nues. Ses mots ne racontent pas seulement des histoires : ils sondent, interrogent, dérangent et illuminent ce que nous refusons parfois de voir en nous-mêmes. Dans ses textes, le quotidien devient un territoire de mystères et d’intensités, chaque geste, chaque silence, chaque émotion est une ouverture vers l’infini intérieur.
La force de Clarice réside dans sa capacité à transformer le banal en expérience existentielle, à révéler la fragilité et la complexité de l’être humain avec une sincérité qui frappe et bouleverse. Lire Clarice Lispector, c’est accepter de se perdre et de se retrouver dans la profondeur de ses mots, c’est ressentir la vie dans ses moindres frémissements.
J’ai caché un amour par peur de le perdre, et j’ai perdu cet amour pour l’avoir caché.
J’ai tenu la main de quelqu’un par peur, et j’ai eu si peur que je ne sentais même plus mes propres mains.
J’ai repoussé des êtres chers, et je l’ai regretté.
J’ai passé des nuits à pleurer jusqu’à m’endormir, et je me suis parfois endormie si heureuse que je n’arrivais même plus à fermer les yeux.
J’ai cru à l’amour parfait, et j’ai découvert qu’il n’existe pas.
J’ai aimé des gens qui m’ont déçue, et j’ai déçu des gens qui m’aimaient.
J’ai passé des heures devant le miroir à essayer de comprendre qui j’étais ; parfois j’étais si sûre de moi que je voulais disparaître.
J’ai menti et je l’ai regretté ensuite, j’ai dit la vérité et je l’ai regretté aussi.
J’ai fait semblant d’être indifférente à ceux que j’aimais, pour ensuite pleurer en silence dans mon coin.
J’ai souri en pleurant de tristesse, j’ai pleuré de rire.
J’ai cru en des gens qui n’en valaient pas la peine, et j’ai cessé de croire en ceux qui en valaient vraiment la peine.
Il m’est arrivé d’avoir des fous rires incontrôlés.
J’ai cassé des assiettes, des verres et des vases sous le coup de la colère.
J’ai terriblement regretté quelqu’un sans jamais le lui dire.
J’ai crié quand j’aurais dû me taire, et je me suis tue quand j’aurais dû crier.
Souvent, j’ai gardé le silence sur mes pensées pour faire plaisir à certains ; et parfois, j’ai dit des choses que je ne voulais pas pour ne pas blesser.
J’ai prétendu être quelqu’un d’autre pour plaire à certains, et j’ai prétendu être quelqu’un d’autre pour déplaire à d’autres.
J’ai raconté d’innombrables blagues nulles juste pour voir un ami sourire.
J’ai inventé des histoires à la fin heureuse pour redonner espoir à ceux qui en avaient besoin.
J’ai trop rêvé, au point de confondre mes rêves avec la réalité… Avant, j’avais peur du noir ; maintenant, dans le noir, je me retrouve, je me tapis et je reste là.
Je suis tombée d’innombrables fois en pensant que je ne me relèverais pas, et je me suis relevée d’innombrables fois en pensant que je ne retomberais plus.
J’ai appelé des gens que je n’avais pas envie d’appeler juste pour éviter d’appeler ceux que j’avais vraiment envie d’appeler.
J’ai couru après une voiture qui emportait un être cher.
J’ai appelé ma mère en pleine nuit, fuyant un cauchemar. Mais elle n’est pas venue, et le cauchemar est devenu encore pire.
J’ai appelé des proches « amis » et j’ai découvert qu’ils ne l’étaient pas… Et certaines personnes, je n’ai jamais eu besoin de les appeler ainsi : elles ont toujours été et seront toujours spéciales pour moi.
Ne me donnez pas de formules toutes faites, car je ne m’attends pas à toujours réussir.
Ne me dites pas ce que vous attendez de moi, car je suivrai mon cœur.
Ne me forcez pas à être ce que je ne suis pas ; ne m’invitez pas à être comme tout le monde, car, honnêtement, je suis différente.
Je ne sais pas aimer à moitié, je ne sais pas vivre dans le mensonge, je ne sais pas voler en gardant les pieds sur terre.
Je suis toujours moi-même, mais je ne le serai certainement pas éternellement.
J’aime les poisons les plus lents, les boissons les plus amères, les drogues les plus puissantes, les idées les plus folles, les pensées les plus complexes, les sentiments les plus intenses.
J’ai un appétit vorace et les illusions les plus extravagantes.
Vous pourriez même me pousser du haut d’une falaise et je dirais :
« Et alors ? J’ADORE VOLER ! »
Conclusion :
À travers ce texte, nous avons parcouru les méandres de l’amour, de la peur, de la solitude et du désir de liberté. Chaque expérience racontée nous rappelle que la vie se vit intensément, sans demi-mesure, avec ses chutes et ses élans. C’est dans cette honnêteté brutale et poétique que réside la force des mots.
À propos de Clarice Lispector :
Clarice Lispector (1920‑1977) est une écrivaine brésilienne reconnue pour sa capacité à explorer l’âme humaine avec une profondeur exceptionnelle. Ses textes, à la fois simples et profonds, interrogent l’existence, les émotions et la condition humaine. Son style unique mêle introspection, poésie et intensité psychologique, offrant au lecteur une expérience intime et bouleversante.
Lire Clarice, c’est plonger dans la vie elle-même, dans toute sa complexité et sa beauté fragile.

