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Nous choisissons l’ignorance en vieillissant, même lorsque la connaissance serait plus utile

L’âge où nous décidons d’« éteindre » notre cerveau

Une étude révèle à quel moment nous commençons à éviter la connaissance. Qu’il s’agisse d’ignorer l’actualité ou de ne pas consulter son compte en banque, les adultes font souvent face à l’incertitude en se déconnectant, refusant ainsi de rechercher des informations, même lorsque celles-ci pourraient leur être utiles.

Les scientifiques ont désormais identifié l’instant précis où nous privilégions le confort plutôt que l’incertitude. Des chercheurs de l’Université de Chicago ont déterminé l’âge auquel nous commençons à éviter l’information, un comportement connu sous le nom d’« effet autruche » (même si, en réalité, les autruches ne font pas l’autruche).

Les premières traces dès l’enfance

Ce comportement apparaît bien plus tôt qu’on ne le croit. Une série d’expériences menée auprès de 320 enfants américains âgés de cinq à dix ans a montré que les plus jeunes recherchaient activement la connaissance. En revanche, dès l’âge de sept ans, certains commençaient à éviter l’information lorsque les réponses risquaient de provoquer des émotions négatives.

« Comment se fait-il que les enfants soient si curieux, alors qu’à l’âge adulte, nous finissons par fuir l’information ? » s’interroge Radhika Santhanagopalan, chercheuse postdoctorale à l’Université de Chicago. « Quelle est cette transition ? »

Pourquoi fuyons-nous certaines informations ?

Dans la première expérience, les chercheurs ont exploré cinq raisons possibles pour expliquer ce comportement de « tête dans le sable » :

  1. Éviter les émotions négatives, comme l’anxiété ou la déception.
  2. Éviter les informations négatives sur nos compétences ou notre popularité.
  3. Se protéger des remises en question de nos croyances.
  4. Préserver nos préférences personnelles.
  5. Agir dans notre propre intérêt, par exemple en essayant de ne pas paraître trop intéressé.

Ces recherches montrent que l’évitement de l’information n’est pas seulement un trait adulte, mais qu’il s’installe progressivement dès l’enfance, influençant notre rapport à la connaissance tout au long de la vie.

Des expériences pour comprendre l’évitement de l’information

Différents scénarios ont été élaborés pour déterminer si certains comportements d’évitement pouvaient être déclenchés et quelles motivations les sous-tendaient. Dans un test, chaque enfant devait penser à son bonbon préféré et à celui qu’il aimait le moins, puis se voyait proposer une vidéo expliquant pourquoi manger chacun de ces bonbons était mauvais pour ses dents.

« Nous avons constaté que, alors que les plus jeunes enfants cherchaient réellement à s’informer, les plus âgés commençaient à manifester des tendances à l’évitement », explique Radhika Santhanagopalan. « Par exemple, ils ne voulaient pas savoir pourquoi leur bonbon préféré était mauvais pour eux, mais acceptaient volontiers d’apprendre pourquoi leur bonbon le moins préféré l’était. »

La marge de manœuvre morale

Un phénomène particulier observé est la « marge de manœuvre morale » : certains individus choisissent d’éviter des informations par intérêt personnel, tout en conservant l’apparence d’un comportement juste aux yeux des autres.

Pour illustrer cela, les chercheurs ont mis en place un scénario avec des enfants en binôme. Chaque enfant recevait deux seaux d’autocollants : un seau contenant un nombre connu d’autocollants, et un autre recouvert, contenant un nombre inconnu. Avant de choisir le seau à utiliser, les participants pouvaient savoir combien d’autocollants leur partenaire recevrait.

« Nous voulons agir dans notre propre intérêt, mais nous tenons aussi à paraître justes aux yeux des autres », explique Santhanagopalan. « La marge de manœuvre morale permet d’atteindre ces deux objectifs. »

Même si connaître le contenu du seau de l’autre enfant n’affectait pas leur gain personnel, les enfants plus âgés refusaient de découvrir cette information. Ainsi, ils pouvaient choisir le seau contenant le nombre inconnu d’autocollants pour leur partenaire, sans ressentir de culpabilité. « Ce voile d’ignorance leur permet de choisir la récompense qui leur convient, tout en préservant l’illusion de l’équité », précise Santhanagopalan.

L’évitement de l’information et les émotions

Les résultats montrent que, à mesure que les enfants grandissent, ils évitent de plus en plus d’apprendre certaines informations afin de se protéger des émotions négatives associées. Ce phénomène se vérifie pour toutes les raisons étudiées, sauf une : la compétence.

Tous les enfants se renseignaient volontiers sur leurs résultats scolaires, même si ceux-ci pouvaient être négatifs. Les chercheurs supposent que cela s’explique par le rôle de l’école dans l’apprentissage et l’amélioration personnelle : un mauvais résultat n’est perçu que comme une étape vers un meilleur résultat.

« En recevant des messages sur la façon dont ils peuvent améliorer leurs aptitudes s’ils fournissent l’effort nécessaire, les enfants sont peut-être plus enclins à rechercher des informations, car ils savent qu’ils peuvent potentiellement changer le résultat », explique Santhanagopalan.

L’évitement de l’information à l’âge adulte

À l’âge adulte, l’évitement de l’information devient fréquent. Il peut être motivé par la peur d’être submergé, la remise en question de convictions profondément ancrées ou l’incertitude face à l’inconnu, souvent refoulée de manière consciente ou inconsciente.

Les chercheurs soulignent que ce comportement peut avoir des conséquences personnelles et sociétales. Il contribue notamment à l’aggravation de la polarisation politique, à la rigidité idéologique, et à une plus grande difficulté à faire face à l’incertitude dans la vie quotidienne.

Comprendre et surmonter l’évitement de l’information

L’équipe de recherche suggère de s’interroger activement sur les raisons pour lesquelles nous évitons certaines informations utiles. Il s’agit de reconnaître que nous privilégions parfois un inconfort à court terme au détriment des avantages potentiels à long terme que la connaissance peut apporter.

Une approche consiste ensuite à recadrer ces informations : les considérer comme précieuses et utiles peut réduire la tendance à les éviter et favoriser une attitude plus proactive face à la connaissance.

Apprendre à tolérer l’incertitude

« Les humains ont tendance à vouloir résoudre l’incertitude, mais lorsque celle-ci est perçue comme menaçante, ils cherchent à l’éviter », explique Radhika Santhanagopalan.

Selon elle, il est essentiel d’apprendre à tolérer, voire à accepter, un certain degré d’incertitude. Cette capacité peut constituer un outil précieux pour ne pas tomber dans le piège de l’évitement de l’information et pour continuer à rechercher activement des connaissances, même lorsque celles-ci sont inconfortables.

La recherche a été publiée dans la revue Psychological Science .

Source : Université de Chicago

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Publié par Jean-Charles Réno

À propos de l’auteur: j'aime la nature et l'écologie mais je m'intéresse aussi à la psychologie et la spiritualité, je pense que tout est lié. Je suis arrivé dans l’équipe d’ESM en 2016 après avoir étudié en Angleterre et passé plusieurs années en Australie . Depuis toujours, je suis soucieux de la nature et de mon impact sur l’environnement. Ainsi, par le biais d’informations, j’essaie de contribuer à l’amélioration de l’environnement et de jouer un rôle dans l’éveil des consciences afin de rendre le monde un peu meilleur chaque jour.

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